Evaluer les risques liés au changement climatique pour le patrimoine culturel Africain : le projet CVI-Africa
L'ICOMOS a le plaisir de partager les résultats d'un projet passionnant axé sur le renforcement des capacités et l'évaluation de la vulnérabilité climatique des biens africains du patrimoine mondial de l'UNESCO. Le projet Évaluer les risques liés au changement climatique : Piloter l’Indice de Vulnérabilité Climatique pour le patrimoine culturel en Afrique (CVI-Africa), a été mené par une équipe internationale d'institutions d’Afrique et du Royaume-Uni, dont l'ICOMOS, l'Université Queen's de Belfast, l'Université des Highlands et des Îles, Historic Environment Scotland et le Fonds pour le Patrimoine Mondial Africain.
L'équipe du projet a travaillé en étroite collaboration avec des partenaires de l'Université James Cook en Australie pour développer et appliquer une technique existante d'évaluation de la vulnérabilité - l'Indice de Vulnérabilité Climatique - à deux biens du patrimoine mondial de l'UNESCO en Tanzanie et au Nigeria.
Le projet CVI-Africa a permis de dispenser une formation de base en évaluation de la vulnérabilité à six professionnels du patrimoine africain originaires du Cabo Verde, du Kenya, du Nigeria, de Tanzanie, de Tunisie et d'Ouganda. Il a également donné lieu à l’application de l'Indice de Vulnérabilité Climatique (CVI) à deux biens du patrimoine mondial : le Paysage Culturel de Sukur au Nigeria et les Ruines de Kilwa Kisiwani, ainsi que les Ruines de Songo Mnara en Tanzanie. Le CVI est une méthodologie systématique d'évaluation de la vulnérabilité de la valeur universelle exceptionnelle des sites du patrimoine mondial au changement climatique. Le CVI a été appliqué lors de deux ateliers qui ont eu lieu en septembre et octobre 2021 au Nigeria et en Tanzanie. Chaque atelier a réuni des experts locaux et nationaux, diverses parties prenantes et des partenaires internationaux. Les résultats des ateliers sont désormais publiés sur le site web du projet et dans les archives ouvertes de l'ICOMOS. Bien que les deux biens soient situés dans des contextes géographiques très différents, les résultats indiquent qu'ils sont tous deux vulnérables aux impacts futurs du changement climatique. Ceux-ci vont de l'augmentation des précipitations et de changements des conditions météorologiques à l'augmentation du niveau de la mer. Les deux sites présentent également une capacité d'adaptation considérable, qui permettra probablement de protéger les valeurs clés à court et moyen terme. Les projections à plus long terme sont moins certaines.
« Les impacts du changement climatique entrainent déjà la perte et la destruction du patrimoine culturel à travers l’Afrique », a déclaré le Dr Will Megarry de l’Université Queen’s de Belfast, chercheur principal du projet et point focal du Groupe de travail sur le changement climatique de l’ICOMOS. « Cette perte ne se limite pas aux bâtiments et lieux historiques et archéologiques, elle a également un impact sur les communautés et leurs traditions culturelles. La façon dont ceux qui s'occupent du patrimoine culturel de l'Afrique répondent à la menace du changement climatique a de profondes implications pour la résilience de la communauté dans son ensemble ». Le Dr Jane Downes, de l'Université des Highlands et des Îles, a ajouté : « Le projet CVI-Africa a été mené en étroite collaboration avec des professionnels du patrimoine et des chercheurs de tout le continent pour mieux comprendre ce défi permanent en identifiant le degré de vulnérabilité et en jetant les bases des futures stratégies d'adaptation et de conservation ».
Les résultats du projet confirment les conclusions du chapitre Afrique du sixième rapport d'évaluation du GIEC sur les impacts, l'adaptation et la vulnérabilité. Ceci nous indique que le patrimoine culturel africain est déjà menacé par les risques climatiques, notamment l'élévation du niveau de la mer et l'érosion côtière, et que « la plupart des sites du patrimoine africain ne sont ni préparés ni adaptés aux changements climatiques futurs ». Les décisions relatives à la conservation et à la préservation du patrimoine culturel face au changement climatique commencent par une compréhension détaillée de la vulnérabilité d'un lieu. Le Dr Albino Jopela du Fonds Africain du Patrimoine Mondial, co-investigateur du projet, a déclaré : « Malgré l'intensification de la menace, les dimensions culturelles du changement climatique ne font toujours pas l'objet d'une attention suffisante, et cela est particulièrement vrai sur le continent africain. Le projet CVI-Africa a contribué à combler cette lacune ».
L'équipe internationale comprenait également le Climate Heritage Network (CHN), dont l'ICOMOS assure le secrétariat, ainsi que Historic England, l'International National Trust Organisation (INTO) et l'Union of Concerned Scientists (UCS). Les partenaires nationaux comprenaient le ministère tanzanien des Ressources naturelles et du Tourisme, les musées nationaux de Tanzanie, le comité national nigérian du Conseil International des Monuments et des Sites (ICOMOS Nigeria), la Commission Nationale nigériane des Musées et des Monuments (NCMM) et l'Université américaine du Nigeria (AUN).
Le projet a également permis de développer des outils pour entreprendre des évaluations de la vulnérabilité sur d’autres sites. « Les aspects novateurs des ateliers du CVI en Tanzanie et au Nigeria et de la formation profiteront aux travaux futurs du CVI et ont enrichi la palette diversifiée d'applications réussies dans le monde entier », a déclaré le Dr Scott Heron de l'Université James Cook (Australie) qui, avec le Dr Jon Day, a développé le CVI. Un autre résultat du projet CVI-Africa a été l'installation d'un équipement de mesure du temps au Paysage Culturel de Sukur, grâce à l'initiative d'un participant de l'atelier mené au Nigeria. Les partenaires du projet au Nigeria espèrent lever des fonds supplémentaires pour équiper complètement la station. L'équipe du projet CVI-Africa espère que cette graine semée offrira un soutien aux communautés dans leurs efforts pour sauvegarder le patrimoine culturel, répondre au changement climatique et rechercher des options de développement durable.
Le projet CVI-Africa a été rendu possible grâce à une généreuse subvention accordée par le Fonds de recherche sur les défis mondiaux du Conseil de recherche sur les arts et les sciences humaines du Royaume-Uni. Cette subvention a été financée dans le cadre d'un projet de démonstration organisé par le ministère britannique du Numérique, de la Culture, des Médias et du Sport (DCMS). Le projet contribue au développement d'un axe de travail à plus long terme financé par l'Overseas Development Assistance (ODA) du Royaume-Uni, afin de répondre efficacement aux impacts du changement climatique sur le patrimoine culturel dans les pays en développement.
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Communiqué de presse officiel
Télécharger "An application of the Climate Vulnerability Index for the Sukur Cultural Landscape" depuis l'archive ouverte de l'ICOMOS
Télécharger "Application of the Climate Vulnerability Index for the Ruins of Kilwa Kisiwani and the Ruins of Songo Mnara, Tanzania" depuis l'archive ouverte de l'ICOMOS
Photo © Alafiatayo